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4 février 2009 3 04 /02 /février /2009 18:07

Elle était très jeune, genre 21 ans; très petite, mince, avec des cheveux blonds raides dont une mèche de côté, et coupée net, lui venait toujours sur le visage, lui enlevant un œil ou le coin du sourire.

Quand elle poussait la mèche d’un tic du doigt, alors on voyait ses yeux: d’énormes yeux ronds et bleus. Mais bleus comme noir, avec tout le regard dedans.

Elle était toujours en mouvement, mal fagotée ou débraillée dans l’uniforme qui n’arrivait pas à l’enfermer.

Elle s’appelait Claire, et au début tous les garçons des PS se proposaient à l’aider ceci-cela, comme on fait d’instinct pour un enfant ou un être fragile.

Seulement voilà, Claire faisait ses vidanges de voiture et sautait sur le dos des voyous quand ils rebellaient un peu.

Alors peu à peu les hommes en bleu s’étaient sentis de trop (ou de pas assez) avec cette fille-garçon-femme-enfant, et, pour ne pas en parler à
leur fierté, ils avaient classé Claire dans la case «coéquipier-pas-toucher« .

Sauf que Claire irradiait ses gestes trop purs et trop ronds; et que décidément ça aveuglait un peu….


Et moi je me disais que ça faisait du bien aux vieux murs poisseux de misères, un peu comme un rire qui déchirerait les procédures.


Ut le 04/02/2009

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2 octobre 2008 4 02 /10 /octobre /2008 16:08

Il était un jour un vieux petit homme bien droit dans son costume à chemise blanche.
Il avait de fines lunettes, des yeux gris, les mains qui tremblent.
Il était propriétaire.
Assis à côté de lui était un grand marin roux, le visage émaillé de taches brunes, les lèvres écaillées d’embruns, robuste et planté d’aise dans un pull de jour ordinaire.
Il était locataire.
Le vieux petit homme gris était venu me dire que ce marin son voisin avait détruit une porte à lui.
Le grand marin roux me souriait que le vieux petit homme gris lui faisait des histoires de pluie: il avait bouché de parpaings la porte extérieure commune aux deux logis, pour plus que l’eau du ciel ruisselle dans son jardin. Le grand marin roux avait juste repoussé la porte commune… tombé les parpaings sous sa large main….
Le vieux petit homme gris n’aimait ni l’eau ni les hommes. Il était né dans un quartier de champs, le quartier de la Belle de Mai à Marseille; il n’avais pas compris qu’il ait dû changer.
J’ai dit au vieux petit homme gris que je ne pouvais rien faire pour lui.
Le grand marin roux s’en était allé d’un pas pressé à sa vie.
Le vieux petit homme gris s’était arrêté à la machine à distribuer les boissons, avait tenté de mettre un Euro dans la fente morte: la machine était bien garnie, mais débranchée depuis des lustres pour cause de rats qui rongent.
Les rats, gris, aiment grignoter les fils à boissons.
J’ai dit au vieux petit homme gris que je ne pouvais encore rien faire pour lui. 
Il
était alors parti dans un vague sourire: aujourd’hui il avait tout tenté….

Pendant ce temps, un petit homme faisait un show au palais du Pharo, quartier Sud de Marseille donnant sur l’eau.
L’était pas venu voir les hommes en bleu, en gris, en rousseurs, pour leur prodiguer les mots qui donnent moins peur.


Il était le lendemain de ce jour, vieux petit homme gris en pantalons à poches, débardeur et blouson de toile beige 
avait peur: il venait de se prendre la tête avec un jeune assis sur son perron qui disait qu’il n’appréciait pas son ton.
Vieux petit homme gris avait prit une gifle; reconnu personne sur les photographies d’archives.
Ne pouvant plus rien pour lui, je l’avais fait raccompagner à la maison.


Il sera un jour demain, vieux petit homme gris appellera au commissariat, dira que son quartier est infâme, qu’il n’ose plus sortir de chez lui.
Les hommes en bleu lui diront qu’ils ne peuvent rien faire pour lui, l’autre petit homme de show n’ayant pas voté assez de crédit d’hommes ou de véhicules, pour multiplier les préventions.

Ut le 01/10/2008

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26 septembre 2008 5 26 /09 /septembre /2008 19:48

Laisse moi une fois crier
Hurler qu’il y en a assez de tous ces violents
De tous ces mecs qui viennent raconter,
De toutes ces femmes qui viennent pleurer
De toutes ces insultes, ces mots déments.

Crier le désespoir de l’humanité!

Dieu a oublié les cités,
Ces boîtes à ne pas s’entendre
A pas dormir, à fermer les poings sur son voisin,
Sur l’ancien ami,
Sur la voisine aigrie
Sur les enfants parqués aux grands ensembles.

Pièce d’identité
Racontez-moi cette colère.
"Elle m’a chipé mon mari."
"Il a traité ma mère."
Auditions, confrontations, c’est la guerre:
"J’ai rien fait, c’était comme mon frère"
"J’ai rien dit, c’était ma meilleure amie"

Violences réciproques jours et nuits
Le Proc au bout qui traduit:
Devant le juge, toi, et puis toi, et puis aussi toi
Faut pas recommencer, c’est la loi.

Messieurs Mesdames, cessez
De vous insulter
De vous chamailler
De vous menacer
De vous frapper.
Messieurs Mesdames, cessez
D’encombrer nos policiers.
Cessez
De débiter vos mensonges 
Et toute cette haine
…Toujours les mêmes!

Laisse moi crier,
Pour une fois hurler
En Procès Verbaux paraphés, tamponnés.

Ut le 25/09/2008


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26 septembre 2008 5 26 /09 /septembre /2008 10:37

J’ai appelé quatre mamans: un équipage de police avait rapporté au commissariat quatre enfants qui avaient joué comme nous aurions pu le faire: il s’étaient amusés à jeter des pierres.
Ils n’avaient rien cassé, abîmé personne : ils avaient joué avec ce que la cité leur offrait depuis que l’action conjuguée des maîtresses de l’école primaire et du commissariat attenant, leur avait interdit les pistolets à billes jaunes.
Une petite femme sans couleurs, couverte d’un pointu foulard gris, jupe mi-mollets, sac sur le bras, s’est présentée comme étant la maman d’un des petits.
A peine en présence de l’enfant elle s’est mise à hurler qu’il n’avait pas le droit de sortir, qu’elle avait juste travaillé un peu plu tard ce jour, qu’elle allait le tuer… elle s’est jetée sur lui à grand coup de bras.
Petite femme en colère sur petit homme gris.
Tous les flics présents se sont précipités; un grand homme bleu tout noir lui a dit qu’on avait de la place pour elle si elle continuait.
J’ai regardé l’enfant immobile, je lui ai dit que souvent les adultes ne comprenaient pas; qu’il valait sans doute mieux pour lui qu’il ne sorte plus quand maman le lui interdisait.
Ils sont partis tous les deux, lui devant elle derrière, encore sur ses mots de colère.

Dans un an, dans deux, je suis sûre de le retrouver sur un scoot volé, sans casque et sans assurance, à crisser en pleine rue le pneu arrière… comme l’avait si bien fait un enfant d’hôpital qui ne savait plus ni bouger ni parler ni manger.

Un enfant de douze ans.

Ut le 25/09/2008

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17 septembre 2008 3 17 /09 /septembre /2008 08:31

C'est un Bac plus quatre.
J'avais vu trembler sa femme à pas pouvoir signer sa plainte.
J'avais fait chercher cet homme.
Il est assis face à moi. 

Il ne peut pas comprendre qu'on frappe pas avec une ceinture sur sa compagne et ses gosses.

Je n'accepte pas qu'il parle seul à celle qu'il a frappée, menacée, insultée; qu'il tente de lui arracher encore une fois un pardon sur une explication où elle sera, comme chaque fois, la fautive, la folle à plier l'homme de colère.

Il ne veut pas entendre une femme, une flic, lui gifler un ordre.
Il se bat avec les quatre bleus qui doivent le descendre en garde à vue;
il hurle, il fonce tête en avant.
Un de mes bleus se déchire le doigt pour ne pas blesser sa folie.

Elle est foetus sur la chaise dure et blanche, juste à côté de moi.

Ce soir il sera devant la justice...
Ce soir, elle dormira.

Ut le 17/09/2008


Je sais, sans doute qu'il y a trop de mots en ce moment.
C'est peut-être ce  fichu rhume... un rhume au cerveau? ;)

Il faut que j'élargisse le temps; que je raccourcisse les manips sur l'ordi pour garder les vrais moments à me remplir de vous.
Alors, pour sauver ce temps là, j'irai répondre à vos coms chez vous.
Ne m'en veuillez pas, s'youplaît :)

Pis finalement, c'est pas un peu "Narcisse" que de répondre aux compliments?

Baisers à vous tous, à ma vie d'en dedans qui couvre le monde.....
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17 septembre 2008 3 17 /09 /septembre /2008 06:15
Il fait la même odeur de soleil plat d'hiver que ce matin là, quand avec son poing elle avait voulu écraser sa colère sur l'oreiller à dormir enfin.
C'était au tout début de sa vie d'appels 17.
Personne pour lui dire un câlin à épousseter sa peine; rien que le gris vague d'un petit matin vide, trop large.
Elle avait toujours du mal à s'endormir après une longue vacation de travail: la langue toute gonflée de fatigue, la tête pas encore raccommodée au présent, au temps qui fait pas peur;  c'est pas facile de gommer d'un coup de cil une nuit de flic de rues.
Mais bon sang, là!... L'avait la haine par dessus.

Tous ces gens si petits qui vivent à hurler en silence jusqu'au moment où ce cri déborde dans la rue et vient aux oreilles des bleus.

Une porte fermée sur la cuisine. Dedans, une femme, jeune et belle et grande, vautrée dans son vomi, du camembert collé partout sur elle; des heures d'inconscience d'alcool à évaporer. Elle rabâchait une bouillie de mots qui disaient qu'il était parti. Parti. Parti.
Elle avait hurlé quand les bleus l'avaient ceinturée pour la poser sur le canapé. Une bête aux abois; une chose perdue qui ne savait plus que se battre contre la douleur répétée du malheur.

L'appartement sentait le bois, les livres et la musique.

Elle n'avait accepté, au bout des larmes, que cette petite bleue d'âge qu'avait les yeux enfoncés sur elle.

Elle s'était claquée dans ses bras; des bras de flic: gros blouson d'hiver, pare-balles et gants de cuir à pas toucher de trop près aux malheurs.
Les bras l'avaient cajolée, laissée l'appeler "Ma chérie", laissée téléphoner à une enfant qui n'existait plus; laissée faire des bisous d'alcool et de vomi; raconter du passé, du présent, du rêvé... si longtemps... jusqu'à ce qu'elle accepte l'enfermement.
Quand l'ambulance rouge l'avaient enfin emmenée sur un dernier cri, son amour parti était arrivé; tremblé au bord du trottoir du jour à naître.
Il avait raconté, vite fait, parce que les bleus attendaient pour quitter les lieux et aller dormir, son amour et leurs nuits d'alcool tous les deux; les cris, les heures à angoisses, les livres balancés, le téléphone écrabouillé... sa fuite pour sauver ce qu'il lui restait d'âme.

L'oreiller doit se souvenir  encore.....

Ut le 17/09/2008
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25 août 2008 1 25 /08 /août /2008 22:32

Il était très vieux, très sale, très hirsute, et la braguette en goguette.
Du côté des geôles s'en est allé faire pipi,
Et puis au coin du plaignant s'est assis.
M'a raconté qu'il était venu Dimanche,
Qu'on l'avait éconduit,
Et qu'il revenait à pied ce Lundi
Parce qu'on lui avait chipé
Les sièges, les portières de sa voiture du Dimanche.
Mon ordi le connaissait,
Y avait plus qu'à tamponner, signer,
"Ici s'il vous paît."
En sortant le stylo de ma poche
Il a vu dépasser le bleu de mes clopes,
M'a demandé une cibiche
Mon p'tit vieux, "S'il vous plaît
Madame la Police".
J'ai souri,
J'ai dit oui,
L'est r'parti,
Tout vieux, tout sale, tout hirsute, et la braguette en goguette.

Ut le 25/08/2008

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15 août 2008 5 15 /08 /août /2008 22:37
Il est tellement tôt!
Le jour n'a pas encore enjambé l'aube.
La voiture sérigraphiée, chaude des collègues de la nuit, les assied dans les sièges avachis aux relents de frites et de crasses.
Son équipier n'a pas eu le temps de la douche: il dégage à ses côtés l'odeur des lits défaîts, et le gris de ses joues traduit le lever soudain et engourdi.
Les phares jaunes.
La radio pas encore affolée, noir fil de survie sur lequel ils sont tous emmaillés à l'écran de contrôle.
Caler son corps et ouvrir la vigilance: ils vont tourner au plus glacé du temps, aller à la rencontre des errances pas encore couchées, souvent avinées ou défoncées; ils vont courser ces voleurs fous qui allument les feux rouges à hurler les sirènes; ils vont jouer au gendarme et au voleur, à la pointe des alarmes déclenchées dans de lugubres hagards ou de sinistres garages accroupis dans le noir; ils vont vérifier que les cités sont vides, qu'aucune poubelle ou voiture n'y brûle; et épier les motards casqués et armés, qui rôdent aux abords des stations essence qui allument leurs caisses l'une après l'autre sur le chemin du port, des embarquements.
Au roulis du moteur, ils vont parler doucement, pour garder la chance sur l'équipage, se rassurer aux nouvelles des femmes et des enfants.....
La vacation des bleus de la rue, des hommes, des femmes en tenue, commence...

Ut le 14/08/2008
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12 août 2008 2 12 /08 /août /2008 22:10
Elle a malmené le père pour garder l'enfant adoré.
Elle a achevé la destruction de tout cet amour qui l'avait arrondie.
...Et son ventre déposé, elle en a voulu conserver le fruit.
Pas partager!
Enserrer, enfermer la petite fille née.
Elle a crié vengeance quand le Juge a tranché.
A assailli le père de procédures, de tourments et de revirements.

Au poste de police
L'enfant est posée en silence,
à regarder ces gens:
La mère en furie
Le père hébété
L'enfant oubliée......

Ut le 11/08/2008
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7 août 2008 4 07 /08 /août /2008 22:22

Travail alangui sur l'été
Salle d'accueil dégarnie
Bureaux élargis par les congés
Longs couloirs languissant d'ennui.

Babillages aériens désoeuvrés
Assoupi clapotis des claviers,
Plus ni pleurs ni cris,
Plus de courses effrénées
Accrochées à la radio qui dégluti
La langue impérieuse des ordres saccadés.

Cité assoupie.

Dehors une voix claque
Des pas se réunissent
Se précipitent
Quatre menottés débarquent.

Cité réveillée.

Les ombres qui la hantaient sans but
Trouvent enfin le soulagement du jour,
Elles avancent au pas lourd,
Au futur contact,
Des gamins en Bleu
Sur l'urgence accourus.

Flambent les yeux
Grondent les insultes et les sarcasmes
Violent les gestes abrutis
Tournent tournent les scoots en menaces.

Les gamins en Bleu
S'élancent
Creusent la foule en silence
Tonfa au bout du gant,
Ecartent les poings sortis,
Puis parlementent avec les vieux.

Cité de tous les jeux.

La sueur masque les visages
La fatigue s'appuie sur les corps,

Les scoots se déroutent d'un virage.

Cité essoufflée.

Les gamins en Bleu
Ont cette fois encore,
Réussi à calmer les bleus
De l'été déshabillé
Du bonheur des vacances
Pour ces habitants de la cité,
Pour nos pauvres jeunes errances.

Ut le 07/08/2008


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donner l'encre ou les couleurs de sa symphonie à une note.
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